Tyrus a écrit :Encore une fois, désolé si ça te fait souffrir mais si l'on en parle c'est qu'à notre manière on en souffre aussi.
Il y a quelques temps sur ce site, on me disait de relativiser mes propres malheurs parce que ça pouvait toujours être pire ailleurs, en dépit de la souffrance que ça générait, et des efforts que je faisais pour m'en sortir...
Comme je l'ai dit, je ne remets pas en question le fait que vous n'êtes pas bien dans votre peau...
Je vais aller plus loin te concernant... De mon point de vue, tu as de la chance de te dégouter alors que tu n'es qu'en surpoids... (Oui oui...)
Pendant des années, on m'a répété que j'étais gros alors que je ne l'étais pas... J'avais un petit surpoids, c'est sûr, mais rien de grave... Or s'entendre répéter cette ritournelle partout, tout le temps, de la part des camarades de classe, de la famille, du médecin, ça n'a pas été sans conséquences...
N'étant pas gros, je ne pouvais pas me voir comme tel... Ce qu'on disait de moi ne correspondait pas à ce que je percevais moi-même quand je me regardais... J'ai complètement dissocié ma véritable image de celle que je voyais dans le miroir...
Quand je me suis mis à grossir, vraiment, aux début de mes études, que j'ai pris plus de vingt kilos en deux ans, je ne l'ai pas vu, aussi saugrenu que cela puisse paraitre... Je savais que j'étais gros, et je savais que je n'étais pas beau... Mais je ne le voyais pas... Quand je me regardais dans la glace, il n'y avait rien qui me dégoutait... J'étais totalement incapable de percevoir l'anormalité de ma situation...
Le déclic s'est produit il y a quasi un an de cela... Ça n'a pas été soudain... Ce sont des petites difficultés liées à mon obésité qui se sont accumulées progressivement... Certaines d'entre elles paraissent banales, comme le fait d'être essoufflé dans l'escalier, ou de ne plus être capable de fermer une veste achetée alors que j'avais déjà trente kilos de trop... D'autres sont nettement moins anodines, et marquent psychologiquement...
J'en ai retenu une en particulier, qui a eu un impact indéniable, et qui a probablement ramené le dégoût dans la perception que j'avais de mon corps... J'étais devenu tellement gros que je n'arrivais plus à m'essuyer après avoir été faire la grosse commission...
Durant cette période, je me suis mis à avoir peur, pour ma santé, pour mes capacités physiques... Devenir impotent, être dépendant de quelqu'un, surtout pour des besoins intimes, c'est effrayant... Et c'est durant cette même période qu'en me regardant dans le miroir, j'ai commencé à me dégouter...
Le fin du fin dans ces histoires de perception, et qui montre à quel point j'ai été atteint mentalement, c'est qu'il y a un miroir qui joue les irréductibles... Celui qui est dans ma chambre chez mes parents, celui dans lequel je me suis vu grandir... Je me dégoute dans les tous les autres miroirs, mais pas dans celui-là...
J'aurais bien voulu que ce dégout de moi-même apparaisse il y a bien longtemps, quand je n'avais que quelques kilos en trop...
Aujourd'hui, il est là, et j'essaye d'en faire une force que je peux contrôler à ma convenance... J'en ai besoin pour entretenir ma motivation à perdre du poids... Mais je ne peux pas non plus le laisser m'envahir... Quand je le laisse faire, je deviens très sévère avec moi-même... Il y a de quoi l'être, parce qu'esthétiquement, il reste du boulot, et j'ai clairement fait subir de sacrés dégâts à mon corps... Mais je n'ai pas envie que ça m'empêche de m'aimer... Je n'ai pas envie de devenir inutilement exigeant avec moi-même, sinon, ça n'en finira jamais...
Or, je veux en finir, et avec un peu de chance, ce sera le cas avant la fin de l'année...
Lux a écrit :oui, je persiste à penser qu'il faut apprendre à s'accepter, indépendamment du fait de perdre du poids ou non : on peut mincir et ne toujours pas s'accepter
Je suis tout à fait d'accord avec ça...
Il n'y a pas que l'obésité qui m'a fait complexer... Les dégâts que j'évoque ci-dessus vont être difficiles à gérer... Je ne peux pas non plus changer ma tête, mes bosses sur le front, mon nez, mes mains...
A travers le régime, je n'aspire pas qu'à un changement physique... Il y aura toujours des complexes plus ou moins lourds à porter... En fait, j'essaye surtout de me prouver à moi-même que je peux y arriver... C'est une épreuve... Je pourrais presque parler de voyage initiatique...
Au bout du chemin, le but, c'est de pouvoir m'aimer, tel que je suis, tel que je serai...
C'est aussi une manière de me réconcilier avec la vie, de me prouver que je peux évoluer...
Lux a écrit :Comme si finalement, on n'était vraiment un moins que rien si on ne voulait pas faire partie de la norme... mais il est assez logique au fond que ce forum représente la norme qu'on veut nous imposer socialement, quand bien même beaucoup prétendent en souffrir.
Je suis d'accord aussi...^^
De plus en plus, je suis fier de ne pas être dans la norme...